NR : J’ai d’abord obtenu un MBA en finance et immobilier, qui m’a menée à travailler dans des services d’investissement bancaire et comme consultante en stratégie. Ensuite, j’ai eu envie de me tourner vers le conseil en innovation, et c’est ce qui a provoqué tout ce qui a suivi. J’ai réalisé un doctorat sur le sujet « comment innover pour créer les entreprises de demain ? » à St Gall, puis j’ai rejoint la Wharton School de l’Université de Pennsylvanie, où je suis vraiment entrée dans la sphère entrepreneuriale. Je suis ensuite revenue en Suisse, à l’ETH de Zurich, comme chercheuse. Deux ans plus tard, j’ai eu l’opportunité de rejoindre l’EHL, pour un poste à l’intersection entre l’innovation, la stratégie et le management, qui correspondait totalement à mon profil et mes appétences.
En quoi consistent vos rôles respectifs aujourd’hui ?
RW : J’ai d’abord enseigné dans les Hautes Ecoles Suisses dans le cadre du programme « Create », l’ancêtre de Venturelab, puis j’ai intégré l’EHL comme professeur d’entrepreneuriat et je n’en suis plus jamais parti ! En parallèle j’ai participé à la création d’Innovaud depuis ses débuts, un projet qui me passionne parce qu’il me permet de rester à la page en termes d’innovation.
NR : L’EHL a d’abord instauré des cours d’entrepreneuriat pour les étudiants de Bachelor, puis de Master et finalement dans les MBA. Je prends beaucoup de plaisir à façonner l’activité entrepreneuriale de l’EHL, au travers de ces cours mais aussi grâce au Village de l’Innovation. J'aime regarder là où on réinvente le monde, et les mots introductifs qui nous ont été dits à mon arrivée à St Gall résument bien ma vision : "Rigour needs to meet relevance". J’attache de l’importance à traduire la théorie en pratique, et c’est ce que permettent les outils mis en place par l’EHL et la FIT.
Comment est née la relation entre l’EHL et la FIT ?
RW : A ses débuts, la FIT était vraiment axée sur les start-ups technologiques, mais les business models innovants et le digital sont des enjeux qui ont besoin de ce même soutien. La FIT avait donc une réflexion sur la transformation digitale, et a lancé FIT Digital. Du côté EHL, nous avons lancé le Village de l’Innovation pour initier le développement des entreprises. Les étudiants ont des idées, mais il faut pouvoir mettre le bouton sur ON ! Nestlé, Marriott, la Fondation Casino Barrière et HotellerieSuisse ont eu envie de nous aider financièrement à réaliser ce projet, mais ce n’est pas le métier de l’école de gérer le fonds. Et surtout, comment sélectionner les projets parmi ceux de nos étudiants alors que notre objectif est naturellement que le plus grand nombre réussisse ? Nous avons pensé très naturellement à la FIT, et c’est comme ça qu’est né le programme FIT Food & Hospitality by EHL.
NR : Rejoindre le Conseil de Fondation et le Comité de Sélection Tech Seed de la FIT est en quelque sorte une extension de mon rôle à l’EHL. C’est un moyen supplémentaire de soutenir l’entreprenariat, qui nous donne des ressources complémentaires.
En quoi consiste votre contribution à la FIT ?
NR : Je suis membre du Conseil de Fondation et du Comité Tech Seed. Côté FIT Digital, c’est Winnaretta Zina SINGER, qui gère le Village de l’Innovation de l’EHL, qui est membre du Comité de Sélection FIT Digital.
Au sein du Comité de Sélection Tech Seed, les projets que nous voyons sont de très grande qualité, et ce que je trouve fascinant, c’est l’incroyable ingéniosité dont ces entrepreneurs font preuve. Elle reflète bien la puissance des institutions académiques de la région ! J’admire aussi la passion de ces entrepreneurs prêts à tout risquer en sachant que leurs chances de réussite sont relativement faibles. Je ne suis pas experte dans un domaine en particulier, mais je transpose des réflexions d’un domaine à un autre. Ce sont finalement des échanges réciproques de connaissances.
J’apprécie beaucoup mon rôle au sein du Conseil de Fondation : partager les connaissances et l’expérience des autres membres, contribuer à la création et à la dynamisation d’un écosystème, comprendre les enjeux multiples et trouver un équilibre entre les intérêts de nos institutions respectives et ceux de la Fondation.
Quelle est la particularité du programme FIT Food & Hospitality by EHL ?
RW : L’industrie de l’hospitalité est intrinsèquement assez peu innovante, car elle a un rythme d’activité qui est récurrent quotidiennement. Il faut des entrepreneurs différents pour qu’il y ait de l’innovation dans ce processus-là, et une population jeune voit justement des opportunités, des idées nouvelles et des besoins nouveaux. En offrant une aide financière aux entrepreneurs des domaines Food & Hospitality, nous voulons aider ces nouvelles façons de penser à se concrétiser dans un métier qui est ancien, et le renouveler de l’intérieur.
NR : Contrairement à la tech, le secteur de l’accueil est encore au milieu du processus de disruption. La crise du covid nous a démontré l’importance de l’interaction sociale et du facteur humain, qui sont cruciaux dans notre industrie. L’innovation doit donc les prendre en compte et ne peut être uniquement technologique ou digitale. Le programme FIT Food & Hospitality by EHL permet justement de soutenir la synergie entre notre expertise du secteur de l’accueil et celle de la FIT dans la technologie et le numérique.
Un mot sur l’impact du Covid sur l’hôtellerie ?
NR : J’ai envie de citer Churchill à ce sujet : « Never let a good crisis go to waste ». L’entreprenariat est plus une question de mentalité que d’outils. Les entrepreneurs voient des opportunités dans les crises. Le Covid a des conséquences dramatiques pour le secteur de l’accueil, mais, bien que cela semble contre-intuitif, ce sont souvent ceux qui se lancent et investissent en période de crise qui voient leur croissance accélérer à la sortie de la crise.
RW : Dans la période actuelle où l’industrie hôtelière souffre, les jeunes entrepreneurs trouvent effectivement de nouvelles opportunités. Cette crise nous a aussi permis de repenser notre manière de consommer, et de voyager en particulier. PrivateDeal, qui a obtenu un prêt FIT Food & Hospitality by EHL, est un très bon exemple de résilience. Sa solution de négociation intelligente instantanée a trouvé un nouvel écho auprès des hôteliers en cette période.